vendredi 13 février 2015

Timbuktu



2014

Cinéaste: Abderrahmane Sissako
Comédiens: Ibrahim Ahmed - Toulou Kiki

Notice SC
Notice Imdb

Vu en salle


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D'abord, un malentendu m'a quelque peu décontenancé. Une nouvelle fois j'ai été abusé par mon imagination excitée par les commentaires critiques. J'ai entendu que le film n'était pas sans humour.

De là, j'ai échafaudé toute une construction imaginaire,  celle d'un film drôle, humoristique. Or, il n'en est rien. Certes, il y a des scènes où les djihadistes sont dépeints comme des imbéciles, tournant en rond dès lors qu'il leur est demandé de réfléchir. Mais cet humour est noir, trop noir pour être comique. Peut-être que ces pantins creux sont pour moi des réalités tellement tangibles que l'aspect comique m'échappe alors complètement ? Quoiqu'il en soit, je ne parviens pas à trouver cela drôle, à y déceler de l'humour.

Je n'y vois que du tristement réel. Ces types sont tellement vides de sens, sont si éloignés de la raison mais également de la foi que leur absence d'humanité et d'intelligence ne peut pas me faire rire. Elle est actualité, cette absence. Elle tue, elle massacre aujourd'hui dans le monde entier. Il n'y a guère que l'Amérique du Sud aujourd'hui encore épargnée, mais jusqu'à quand ? Bref, le fait que je sois rétif à ce genre de totalitarisme de manière instinctive et peut-être trop sérieuse m'empêche de rire.

Et là, bien sûr, je pense à "To be or not to be." Peut-on rire du totalitarisme? Oui, bien entendu. Mais le traitement de ce film n'est pas uniquement comique. Il est même plus tragique que comique. Là où Lubitsch s'appuie sur l'absurdité du nazisme pour nourrir un comique salvateur,  Abderrahmane Sissako propose un portrait plus réaliste pour montrer la faillite humaine du système politique imposé par les djihadistes. Aussi les notes humoristiques de Timbuktu m'apparaissent sinon comme incongrues, au moins comme perverties. Ce qui est tout à fait justifié ! En effet, l'islamisme étant une fraude tout aussi politique que religieuse, tout y est perverti. La parole musulmane est détournée. Les lois sont détournées. Le rapport à l'autre est détourné. Tout est détourné vers le ralliement à la violence. L'islam devient prétexte, objet, est en quelque sorte réifié comme un outil de violence. Peu importe que la parole du prophète soit peu ou prou réelle pour les djihadistes. Ils détournent la religion, la violent et en dessinent de nouveaux contours à leur unique profit, de façon à légitimer la loi du plus fort. Celui qui tient la kalashnikov devient imam et peut même dessiner l'horizon en mitraillant un tas d'herbes si l'envie lui en prend. Le vrai imam devient transparent et n'existe plus. Le film démontre tout cela avec justesse.

Malheureusement, je n'ai pas réussi non plus à m'attacher concrètement aux personnages. Je ne sais pas bien pourquoi, mais je suis resté à distance. Aussi malgré la très intelligente démonstration, bien maîtrisée, incisive de Abderrahmane Sissako, je n'arrive pas à apprécier ce film comme il se doit. J'ai aimé la démonstration, mais je demeure sur le plan intellectuel et politique et n'accède pas à l'émotion qu'il essaie de produire. J'en ignore les raisons.

Je ne suis pas dérangé par les acteurs. Je ne suis pas non plus bouleversé par leurs prestations.

Sur la plan visuel, certains plans sont magnifiques, bien construits, bien pensés, mais là non plus, ils ne suscitent pas autant de plaisir que je l'avais espéré. En ce qui me concerne, le cœur ne bat pas comme il le devrait. Pas d'excitation. Dommage. Un bon film qui ne me touche pas suffisamment.

Mini Trombi:
Toulou Kiki:

Ibrahim Ahmed:
Layla Walet Mohamed: (droite)

Adel Mahmoud Cherif:

Kettly Noël:

Abel Jafri (centre), Cheik A.G. Emakni (droite):

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